Après l’élection du nouveau président Joseph Aoun, quelle est la situation politique au Liban ?
Quelques semaines après la chute du régime de Bachar El-Assad dans la Syrie voisine, le Liban s’est doté d’un nouveau président, Joseph Aoun.
Dirigé par le gouvernement intérimaire de Najib Mikati (sur la photo), le Liban n'avait plus de président en fonction depuis octobre 2022 à cause de dissensions politiques trop importantes.
Élu par 99 voix sur 128 au second tour de l'élection présidentielle, le nouveau chef d’État est un chrétien maronite et un général de l’armée libanaise.
Bien qu’approuvée par la communauté internationale, l’élection d’Aoun est controversée sur place, car la Constitution du pays interdit en principe à un chef de l'armée d'accéder à la présidence deux ans avant la fin de ses fonctions militaires, rappelle France Culture.
Les États-Unis et l’Arabie saoudite ont été les chefs de file des efforts de la communauté internationale pour mettre fin à la situation de vacance présidentielle à Beyrouth.
Comme l’indique Courrier international, l’ancien militaire a prononcé un discours d’investiture « historique », dans lequel il n’a pas évoqué une seule fois le Hezbollah chiite.
Joseph Aoun n’a pas mentionné le « fameux triptyque « armée-peuple-résistance » [que chaque président élu devait mentionner dans son serment du temps de la tutelle syrienne sur le pays puis de celle du Hezbollah, donnant de facto le feu vert à une liberté d’action du parti chiite dans le sud du pays] », poursuit Courrier international, citant un article de L’Orient-Le Jour.
Le nouveau président a au contraire garanti dans son discours que l’État libanais aurait le « monopole des armes ». Une rupture annoncée avec la période où le Hezbollah était en pratique la première force armée du pays.
Pour la journaliste de L’Orient-Le Jour, l’élection d’Aoun a été rendue possible par la « défaite cuisante » du Hezbollah contre Israël et par la chute du régime d’Assad, tous deux alliés de l’Iran.
Cette journaliste libanaise qualifie de « miraculeux » l’enchaînement récent des événements au Liban et va jusqu’à évoquer une « troisième indépendance » du pays à la suite de la dernière élection.
Le président élu incarne donc un nouvel espoir face à l’avalanche de problèmes qui frappe le Liban, à commencer par la division confessionnelle entre les 18 communautés religieuses du pays.
France Culture cite « la corruption des élites » et « les conflits régionaux encore vivaces pour les Libanais, malgré l'accord de cessez-le-feu signé le 27 novembre avec Israël », parmi les défis que doit affronter le Liban.
La radio française mentionne également « la question des réfugiés syriens, dénombrés à 1,5 million depuis 2011, ou encore le marasme économique qui frappe le pays depuis la crise financière de 2019. »
Joseph Aoun a d'abord ouvert des consultations pour nommer un Premier ministre, « une obligation constitutionnelle dans le cadre du système confessionnel de partage du pouvoir au Liban », comme le rappelle Le Dauphiné libéré.
Le poste est donc réservé à une personnalité musulmane sunnite. Parmi les prétendants se trouvaient le sortant Najib Mikati, le député milliardaire Fouad Makhzoumi (sur la photo) et le président de la Cour internationale de Justice de La Haye, Nawaf Salam.
Joseph Aoun a également rencontré Nabih Berri, l'influent président du Parlement, qui est aussi un allié du Hezbollah, l’organisation chiite très affaiblie par l’armée israélienne en 2024.
La reconduction de Najib Mikati au poste de Premier ministre était justement soutenue par le Hezbollah et par le mouvement Amal de Nabih Berri.
Finalement, c'est sur le juge expérimenté Nawaf Salam que s'est porté le choix de Joseph Aoun pour former le gouvernement.
Quoi qu’il en soit, le futur pouvoir libanais aura la tâche immense de reconstruire certaines régions du pays après les affrontements entre Israël et le Hezbollah.
Par ailleurs, Beyrouth devra aussi mettre en œuvre l’accord de cessez-le-feu du 27 novembre dernier, qui prévoit en particulier le retrait du Hezbollah de la région frontalière avec l’État hébreu.
Si l’élection de Joseph Aoun suscite incontestablement l’espoir d’un nouveau départ, le Liban reste un État fragile, entouré de voisins plus puissants, au cœur d’une région instable. Le pays du Cèdre parviendra-t-il à tourner la page des guerres pour s’offrir un avenir meilleur ?