Économie : l’Europe est-elle en train de décrocher par rapport aux États-Unis ?

Le retard économique de l’Europe
Une croissance plus soutenue aux États-Unis
Même tendance pour 2024 et 2025
Un écart inscrit dans la durée
Une croissance structurellement plus faible
La comparaison entre États
Entre l’Idaho et l’Arkansas
La première puissance économique mondiale
Une course aux armements profitable
Des facteurs de stagnation
Une préférence pour le temps libre et la sécurité ?
La question de la productivité
Un investissement insuffisant dans la recherche
L’impact des crises successives
L’Allemagne à la peine
Un moteur à l’arrêt
Un écart à relativiser
Des variations trompeuses
L’impact du taux de change
Un écart limité
Une productivité par personne équivalente
L’arbitrage entre travail et loisirs
Quel modèle économique ?
Le retard économique de l’Europe

Sur les deux rives de l’Atlantique, la presse se fait l’écho d’un décrochage économique de l’Europe par rapport aux États-Unis. Qu’en est-il vraiment ?

Une croissance plus soutenue aux États-Unis

De fait, les États-Unis ont enregistré une croissance de l’activité de 2,5 % en 2023, contre 0,5 % pour l’Union européenne à Vingt-Sept, note L’Opinion. Et la tendance devrait se poursuivre.

Même tendance pour 2024 et 2025

D’après les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), citées par Le Figaro, la croissance devrait atteindre 2,7 % aux États-Unis, contre 1,1 % dans l’UE et même 0,8 % dans la zone euro. Pour 2025, les anticipations restent légèrement supérieures pour les États-Unis.

Un écart inscrit dans la durée

Ce décalage s’inscrit dans le long terme. D’après les données de la Banque mondiale, citées par Le Monde, le produit intérieur brut (PIB) américain était supérieur de 30 % à celui de la zone euro en dollars courants en 2010, et de 87 % en 2022.

Une croissance structurellement plus faible

Le quotidien du soir cite aussi une note du consultant McKinsey, qui souligne que la croissance annuelle moyenne du PIB par habitant a été deux fois plus élevée aux États-Unis (1,7 %) que dans l’Union européenne (0,8 %).

La comparaison entre États

Une étude de l’European Centre for International Political Economy, parue en juillet 2023, a comparé le PIB par habitant des pays européens avec ceux des États américains pris individuellement. Avec des résultats sans appel.

Entre l’Idaho et l’Arkansas

Alors que les pays du sud et de l’est de l’Europe arrivaient tous derrière l’État fédéré le plus pauvre, le Mississippi, la France parvenait entre l’Idaho (48e sur 50) et l’Arkansas (49e), et l’Allemagne entre l’Oklahoma (38e) et le Maine (39e).

La première puissance économique mondiale

Soutenus par la force de frappe de leurs entreprises technologiques, par les plans de relance de l’administration Biden et par leur indépendance énergétique, les États-Unis s’affirment plus que jamais comme la première puissance économique mondiale.

Une course aux armements profitable

Par ailleurs, le boom des dépenses militaires mondiales depuis le début de la guerre en Ukraine profite davantage aux États-Unis, car de nombreux États s’approvisionnent en priorité auprès du pays qui est aussi la première puissance militaire au monde.

Des facteurs de stagnation

À l’inverse, l’Europe apparaît handicapée par des facteurs structurels, comme le vieillissement de sa population, le déficit d’investissement, la dépendance énergétique et des contraintes réglementaires sans équivalent dans le monde.

Une préférence pour le temps libre et la sécurité ?

En 2023, le Wall Street Journal évoquait « une population vieillissante qui préfère le temps libre et la sécurité de l’emploi aux revenus » pour expliquer le retard européen. Les habitants du Vieux Continent auraient-ils une préférence pour les loisirs ?

La question de la productivité

Pour l’économiste Patrick Artus, de la banque Natixis, l’enjeu de la productivité est central pour expliquer le décrochage européen : la productivité par tête a augmenté de plus de 20 % aux États-Unis entre 2010 et 2024, contre environ 5 % pour la zone euro sur la même période.

Un investissement insuffisant dans la recherche

L’expert note aussi que l’investissement en recherche-développement (R&D) est plus élevé aux États-Unis sur toute la période. En 2022, il s’élevait par exemple à près de 3,5 % aux États-Unis, contre un peu moins de 2,3 % dans la zone euro.

L’impact des crises successives

Quoi qu’il en soit, les chocs successifs (crise financière de 2008, pandémie de Covid-19, crise énergétique et du pouvoir d’achat liée à la guerre en Ukraine) ont laissé des stigmates plus profonds dans l’ancien monde que dans le nouveau.

L’Allemagne à la peine

Locomotive économique de l’Europe, l’Allemagne est empêtrée dans une crise énergétique liée à la sortie simultanée du nucléaire et du gaz russe, tandis que son industrie est touchée de plein fouet par la concurrence chinoise.

Un moteur à l’arrêt

Le pays a connu une légère récession en 2023, avec des conséquences négatives sur tout le continent. Et les perspectives semblent à peine meilleures pour l’année en cours.

Un écart à relativiser

Cependant, la variation du taux de change entre l’euro et le dollar doit amener à relativiser l’idée d’un écart massif et croissant entre les deux blocs économiques occidentaux.

Photo : JustStartInvesting / Unsplash

Des variations trompeuses

Une étude de l’institut européen Bruegel rappelle que le PIB de l’UE était inférieur d’un tiers à celui des États-Unis en 2000, puis légèrement supérieur en 2008 et à nouveau inférieur d’un tiers en 2022. Comment expliquer de telles variations qui ne reflètent pas celles de l’activité ?

L’impact du taux de change

La réponse est simple : l’euro valait 0,92 dollar en 2000, puis 1,47 en 2008 avant de retomber à 1,05 dollar en 2022. Les variations des prix expliquent donc en partie (mais pas entièrement) l’avance affichée par l’économie américaine.

Un écart limité

Exprimé en parité de pouvoir d’achat (en neutralisant les variations du taux de change), l’écart entre les deux économies apparaît beaucoup plus limité, le PIB par habitant passant d’un niveau identique en 2000 à 4 % de moins pour l’UE en 2022.

Une productivité par personne équivalente

De même, l’accélération de la productivité américaine s’explique par le plus grand nombre d’heures travaillées dans ce pays. Car, comme le relève l’institut Bruegel, la productivité par heure travaillée était équivalente en France, aux États-Unis et en Allemagne en 2022.

L’arbitrage entre travail et loisirs

« Certains pays de l'ouest et du nord de l'Union européenne sont au moins aussi productifs que les États-Unis en termes de production par heure travaillée, mais les Européens semblent préférer les loisirs aux revenus », conclut cet institut, dont les travaux sont cités par Slate.

Quel modèle économique ?

Ce décalage pose plus généralement la question du modèle économique souhaitable pour nos sociétés : faut-il aller vers toujours plus de croissance par le travail, ou privilégier une vie plus sobre et sacrifier du pouvoir d’achat pour s’adapter aux impératifs écologiques actuels ?

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