Malgré l’urgence écologique, la course à l’Arctique se fait de plus en plus vive entre les puissances
Avec ses déclarations récentes sur le Groenland, le président américain élu, Donald Trump, a relancé le débat sur le rôle des principales puissances mondiales dans le Grand Nord.
Au-delà du Groenland, une véritable course à l’Arctique est lancée depuis des années. La région la plus septentrionale du monde semble être l’objet de toutes les convoitises.
En effet, la zone arctique possède dans son sous-sol des ressources abondantes en hydrocarbures, estimées à 30 % du gaz et 13 % du pétrole présents dans le monde, rappelle Radio classique.
En 2020, ces réserves représentaient « jusqu’à 412 milliards de barils, soit environ 1,8 fois l’Arabie Saoudite », selon le documentaire « Arctique, la guerre du Pôle », diffusé sur France 5.
Citée par Radio Classique, Agnès Hubschmann, la réalisatrice du documentaire, déclare avoir « été surprise d’un côté par cette catastrophe écologique en cours phénoménale et de l’autre côté par les trois grandes puissances intéressées sur des plans économiques et militaires ».
Ces trois grandes puissances qui s’opposent indirectement pour tenter de contrôler et d’exploiter les territoires arctiques sont les États-Unis, la Chine et la Russie.
Ces trois pays « s’affrontent sur ce territoire qui, en se réchauffant, dévoile peu à peu ses trésors et notamment les ressources pétrolières et gazières présentes dans le sous-sol polaire », indique la radio française. Des ressources dont l’exploitation participe au réchauffement climatique !
En réalité, les États qui contrôlent ces territoires sont la Norvège, la Russie et les États-Unis à travers l’Alaska. Mais ils ne sont pas les seuls à s’y intéresser !
Comme le précise Agnès Hubschmann, « des pays qui ne sont pas forcément des pays arctiques veulent aussi profiter de ces trésors et de ces nouvelles ressources. La Chine par exemple essaye absolument d’y mettre un pied pour bénéficier des ressources. »
Ainsi, la Chine est devenue le premier investisseur étranger dans la région. En 2020, Pékin a passé avec la Russie un contrat à 370 milliards de dollars pour exploiter le gaz arctique.
Concrètement, la Chine a investi avec Moscou dans le projet Yamal LNG, un gigantesque complexe de gaz naturel liquéfié dans l’Arctique russe.
Le choc de ces ambitions provoque des tensions géopolitiques. « On observe des comportements de la Guerre froide, mais avec des technologies bien plus avancées », analyse Andreas Osthagen, chercheur au Fridtjof Nansen Institute, en Norvège, pour Courrier international.
Pourtant, l’exploitation à outrance de la région ne fait qu’accélérer la fonte de la banquise. Celle-ci « a déjà subi une réduction importante de sa superficie, avec une fonte d’environ 40 % entre la décennie 1980-1989 et la décennie 2010-2019 », indique l’Institut français de relations internationales (Ifri).
Par ailleurs, cette région se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète. Un rapport de la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine a indiqué en 2023 que les sept années précédentes y avaient été les plus chaudes depuis 1900.
Au lieu de provoquer une prise de conscience de la communauté internationale, cette catastrophe écologique ne fait qu’attiser les convoitises. En effet, la fonte des glaces libère de nouvelles routes commerciales, les routes du nord.
Sous l’effet de la fonte de la banquise, l’Arctique pourrait être libre de glace en été dans 25 ans. Comme le rappelle Courrier international, ces routes pourraient réduire de 40 % les temps de trajet maritime entre la Chine et l’Europe, créant de nouvelles opportunités commerciales.
« Pour Pékin, le raccourci par la nouvelle route maritime du nord est une aubaine. Il pourrait lui faire gagner jusqu’à deux semaines sur les 48 jours de voyage entre Shanghai et Rotterdam », indique le documentaire sur l’Arctique.
En principe, la coopération dans la région est assurée par le Conseil de l’Arctique, qui comprend les États de la région (Canada, Danemark, États-Unis, Finlande, Islande, Norvège, Suède, Russie), ainsi que six organisations de peuples autochtones et douze pays observateurs.
Cependant, les sept autres États ont suspendu leur coopération avec la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine. Par ailleurs, Moscou installe de nouvelles capacités militaires sur place.
Les activités humaines dans l’Arctique ont des conséquences néfastes, en particulier pour les communautés autochtones. En outre, la fonte de la banquise et du permafrost provoquée par la hausse des températures aggrave en retour le réchauffement climatique.
Anticipant l’effondrement de ces écosystèmes, des glaciologues se rendent sur place pour forer les sols et conserver ce qu’ils nomment les « extraordinaires archives du climat », indique Le Temps.
« Nous voulons récupérer et préserver, pour les générations futures de scientifiques, ces extraordinaires archives du climat de notre planète avant que toutes les informations qu’elles contiennent ne soient complètement perdues », indique Carlo Barbante, directeur de l’Institut italien des sciences polaires, cité par ce journal.
Course contre-la-montre pour la préservation de l’environnement ou course entre les puissances pour les ressources de l’Arctique ? L’urgence climatique ne semble pas décourager les ambitions pour exploiter l’extrême nord de la planète !