Croissance en berne : sommes-nous au cœur d'une "décennie perdue" pour l'économie ?
Si les gouvernements ne procèdent pas à des changements politiques audacieux pour stimuler l'investissement et réduire les coûts commerciaux, nous pourrions entrer dans une "décennie perdue", selon un rapport de la Banque Mondiale sur l'état de l'économie dans le monde.
Il est vital, selon la Banque Mondiale, d'augmenter le taux de participation de la population active. Elle avertit que des initiatives ambitieuses visant à stimuler l'offre de main-d'œuvre, la productivité et l'investissement sont nécessaires pour éviter une tendance économique au ralentissement des taux de croissance dans le monde entier.
Le changement climatique et la réduction de la pauvreté : ces deux problèmes pourraient passer au second plan, selon les experts, en cas de ralentissement de la croissance du produit intérieur brut (PIB) dans le monde entier.
Le taux de croissance du PIB indique la vitesse maximale à laquelle la production mondiale peut augmenter sans provoquer d'inflation. C'est comme une limite de vitesse pour l'économie.
L'investissement dans des secteurs durables, la croissance des services et l'augmentation de la participation de la population active pourraient augmenter la croissance projetée de 0,7 point, de 2,2 % à 2,9 % selon le rapport.
Indermit Gill, l'économiste en chef de la Banque mondiale, déclare que si les changements de politique ne sont pas effectués, "L'économie mondiale pourrait perdre une décennie".
La Banque mondiale surveille également l'évolution du secteur bancaire, rapporte Ayhan Kose, la directrice du groupe de prévision de la Banque mondiale à l’agence de presse londonienne "Reuters". La hausse des taux d'intérêt et le resserrement des conditions financières rendent l'accès aux prêts plus difficile pour les pays en développement, comme elle l'explique.
Malgré les efforts du gouvernement américain pour atténuer les crises, le secteur bancaire du monde entier a été affecté par la chute de la Silicon Valley Bank et du Crédit Suisse en mars. Une crise de confiance fait maintenant rage dans le monde bancaire.
"Le ralentissement que nous décrivons (...) pourrait être beaucoup plus marqué si une nouvelle crise financière mondiale éclatait, en particulier si une récession mondiale accompagnait cette crise", déclare Kose aux journalistes. Le rapport prévient également qu'une nouvelle crise pourrait être trop violente pour que l'économie mondiale y survive.
L'épidémie du COVID-19, la guerre en Ukraine et les autres "situations d'urgence" ont mis fin à trois décennies de croissance économique. Ce sont les crises qui se chevauchent qui ont provoqué ce ralentissement économique.
La croissance moyenne du PIB de 2,2 % attendue pour la période 2022-2030 est inférieure à celle de 2,6 % enregistrée pour la période 2011-2021 et représente une baisse de près d'un tiers par rapport à la moyenne de 3,5 % enregistrée pour la période 2000-2010. L'étude indique également que la productivité devrait croître à son rythme le plus lent depuis 2000.
Le taux de croissance du PIB des pays en développement est passé de 5 % à 4 % depuis 2010 et à deux points des 6 % des années 2000. Ces pays avaient une plus forte croissance que les autres, mais sont également plus touchés par les crises.
Un pays en développement sur quatre a atteint le statut de pays à revenu élevé au cours des trois dernières décennies grâce à l'augmentation de la productivité et des revenus et à la baisse de l'inflation. Ces facteurs qui sont aujourd'hui en déclin et la faiblesse des investissements sont à l'origine du ralentissement du développement de ces pays.
Le rapport suggère que les décideurs politiques devraient donner la priorité à la réduction et au contrôle de l'inflation pour inverser le ralentissement. Ils pourraient ajouter 0,3 % à la croissance annuelle potentielle en assurant la stabilité du secteur financier, en réduisant la dette et en stimulant le commerce par la réduction des coûts de transport, de logistique et de réglementation.
Éliminer les restrictions d'accès aux biens et services respectueux de l'environnement et les préjugés à l'égard des actifs à forte intensité de carbone sont les points principaux que la Banque Mondiale recommande de prendre en compte pour les investissements durables.
L'augmentation des exportations de services numériques et la diversification de la main-d'œuvre pourraient stimuler la croissance d'environ 0,2 % par an d'ici à 2030 selon le rapport.
L’économie mondiale en 2023 : vers un ralentissement de l’activité et de votre pouvoir d’achat ?