Entre pertes de valeur en bourse et licenciements : les entreprises de la tech dans la tourmente
Pertes gigantesques en bourse, annonce de plans de licenciements sans précédent : après des années d’euphorie, les grandes entreprises technologiques américaines traversent une période noire depuis le début de l’année 2022 et la tendance ne semble pas prête à s’inverser. Retrouvez en images tout ce qu’il faut savoir sur la crise actuelle de la tech.
Dans les années 2010 marquées par la crise du secteur financier, les grandes sociétés technologiques américaines avaient pris le relais et leurs cours de bourse avaient atteint des niveaux stratosphériques : au 1er janvier 2022, la valeur totale de Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft avait atteint 10 100 milliards de dollars, dont près de 3 000 milliards pour la seule marque à la pomme.
Les confinements à répétition pendant la pandémie de Covid-19 avaient donné un nouveau coup d’accélérateur au commerce en ligne et poussé ces entreprises à investir et à recruter massivement. Mais le retour à la normale a mis sous pression leurs bénéfices tout en révélant le ralentissement de leur croissance.
Entre survalorisation en bourse, baisse de la rentabilité et ralentissement de l’innovation, tous les ingrédients étaient réunis pour un difficile retour à la réalité. D’autant plus que les modèles d’affaires de ces sociétés sont désormais matures et qu’elles sont devenues aussi vulnérables aux cycles économiques que les autres.
Selon Jan Loeys, un spécialiste de la bourse à la banque JP Morgan cité par le journal belge ‘L’Écho’, la croissance de ces sociétés « a été générée en grande partie par l’acquisition de concurrents potentiels ». « Les petites sociétés technologiques sont plus intéressantes, car c’est de là que les nouvelles idées peuvent jaillir. Ce sera d’autant plus vrai si l’administration démocrate de Biden réussit, par le truchement d’une politique plus stricte en matière de concurrence, à empêcher la Big Tech de racheter ses concurrents. », ajoute-t-il.
La première conséquence de cette crise de la tech a été un effondrement de la capitalisation de ses principales firmes : entre le 1er janvier et le 10 novembre 2022, la valeur en bourse des cinq géants du numérique a chuté de 34 %. Une pente qui sera lente à remonter dans les années à venir.
La valeur de Meta, la maison mère de Facebook, Instagram et WhatsApp, a particulièrement souffert en passant de 942 à 247 milliards de dollars sur cette période.
Conséquence logique de cette baisse de régime, les grandes sociétés technologiques ont annoncé à tour de rôle des plans de licenciements d’une ampleur jamais vue dans le secteur. Selon ‘La Tribune’, 68 000 salariés de la tech ont perdu leur emploi rien qu’au mois de janvier 2023, après une première vague de 90 000 départs au mois de novembre dernier.
Dès novembre 2022, Meta annonçait le licenciement de 11 000 employés, soit 13 % de ses effectifs, et un gel des embauches pour plusieurs mois. Cité par ’01net’, le fondateur et dirigeant de la société Mark Zuckerberg (sur la photo) voit dans cette situation la conséquence de « mauvais calculs réalisés lors de la pandémie de Covid-19 » pendant laquelle il avait misé sur une « accélération permanente » du commerce en ligne.
Meta continue toutefois d’investir massivement dans le métavers, la technologie de réalité virtuelle, que Zuckerberg considère comme un « domaine de croissance hautement prioritaire ». Un investissement considéré comme un gouffre financier par certains observateurs et dont même l’entreprise admet qu’il ne sera pas rentable avant 2030.
Début janvier 2023, le géant du commerce en ligne Amazon a annoncé un plan de licenciement massif de 18 000 employés, après avoir envisagé un premier chiffre de 10 000 postes au mois de novembre. Les compressions de personnel toucheront prioritairement les boutiques Amazon et n’épargneront pas le continent européen.
Pour faire face à l’explosion du e-commerce liée à la pandémie, Amazon avait embauché à tour de bras : avec 427 000 recrutements effectués pendant les confinements, l’entreprise de Seattle avait dépassé le nombre de 1,5 millions d’employés. Mais Andy Jassy, le successeur de Jeff Bezos à la tête du groupe, a évoqué un contexte économique « incertain et difficile » pour justifier les coupes actuelles.
Quelques semaines après Amazon, Microsoft a aussi annoncé le licenciement de 10 000 salariés dans les trois prochains mois, ce qui représente 5 % de ses effectifs.
Alphabet, la maison mère de Google, a annoncé de son côté le licenciement de 12 000 personnes, soit un peu plus de 6 % de ses effectifs dans le monde. Le célèbre moteur de recherche redoute par ailleurs des innovations concurrentes en matière d’intelligence artificielle, comme le générateur ChatGPT.
Dans son communiqué, le PDG du groupe Sundar Pichai (sur la photo) a rappelé la « croissance spectaculaire » des dernières années. « Pour soutenir et alimenter cette croissance, nous avons embauché pour une réalité économique différente de celle à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui. »
Mais la vague de licenciements dans la tech ne concerne pas uniquement les géants du secteur. L’éditeur de logiciels Salesforce a aussi annoncé une baisse de 10 % de ses effectifs, soit 7 000 emplois supprimés. Selon ’01net’, l’entreprise a reconnu avoir trop embauché pendant la pandémie avec un accroissement de ses effectifs de 30 % en deux ans.
Racheté l’an dernier par le patron de Tesla Elon Musk, Twitter s’est séparé de la moitié de ses employés. Le fondateur du réseau social, Jack Dorsey, cité par ’01net’, s’est jugé responsable de cette réduction massive de personnel, considérant qu’il avait « augmenté la taille de l’entreprise trop rapidement. »
Les plus grandes sociétés technologiques doivent présenter leurs résultats dans les prochaines semaines, alors que leurs perspectives s’annoncent sombres à court terme. Les années qui viennent nous diront si elles parviennent à remonter la pente financièrement et à rester au cœur de l’innovation.