Corée du Nord : pour relancer son économie, le pays mise sur l'exportation de produits capillaires
Pour relancer son économie tout en contournant les sanctions internationales, Pyongyang aurait trouvé un stratagème efficace : exporter des produits capillaires dans le monde, en transitant par la Chine.
Selon plusieurs enquêtes menées par Reuters et The Guardian, la Corée du Nord utiliserait l'exportation de cheveux pour relancer son économie et probablement accroître le financement de ses programmes militaires. Mais, qu'en est-il au juste ?
Des experts ont affirmé que la Corée du Nord exportait des produits capillaires (perruques, faux cils et barbes postiches) vers la Chine, qui les commercialisait ensuite vers des États tiers.
Selon The Guardian, la Corée du Nord envoie les cheveux en Chine, où des travailleurs chinois assemblent les produits, puis exporte les perruques.
Reuters a déclaré que ces articles entrent ensuite facilement dans les pays occidentaux, tels que le Japon et la Corée du Sud, et peuvent être vendus sous l'étiquette "Made in China", sans l'être réellement.
Ces marchandises représentent pourtant une part importante de son commerce extérieur : le journal The Guardian rapporte ainsi que plus de "60 % des exportations annuelles de la Corée du Nord" proviennent de cette activité.
Le journal a indiqué par ailleurs qu'en 2023, la vente de ces accessoires avait rapporté 163 millions de dollars (soit environ 152 millions d’euros) à l’économie nord-coréenne, soit 13 fois plus qu’en 2022.
En 2023, Pyongyang a exporté plus de 1 600 tonnes de produits capillaires vers la Chine voisine et cela n'est pas près de s'arrêter, car il s'agit d'un marché en plein essor.
Selon Reuters, le commerce a explosé après la réouverture des frontières après la pandémie, avec des prix en hausse. En 2019, la Corée du Nord a exporté 1 829 tonnes pour une valeur de seulement 31,1 millions de dollars (soit 29 millions d'euros).
Reuters a déclaré que le commerce des produits capillaires a contribué à la reprise des exportations du pays et fournit des ressources vitales au pays lourdement sanctionné. Le régime de Pyongyang cherche à soutenir coûte que coûte une économie nationale en grande souffrance.
Selon The Guardian, les perruques (et autres produits capillaires) proviennent du travail forcé, ce qui est une caractéristique commune aux entreprises nord-coréennes qui parviennent à échapper aux sanctions internationales.
Le journal précise par ailleurs que le pays gère également une chaîne d'une cinquantaine de restaurants en Chine avec ses travailleurs nationaux.
Compte tenu du régime secret de Kim Jong-un, il est difficile de savoir quelle part des recettes provenant des exportations de produits capillaires est affectée aux programmes militaires.
Toutefois, des experts cités par Reuters ont déclaré que le régime a tendance à prélever jusqu'à 90 % des revenus internationaux de ses citoyens, et que la plupart des fonds publics sont consacrés aux programmes militaires et nucléaires. Bien entendu, les cas de protestation des Nord-Coréens sont pratiquement inexistants, en raison du contrôle total que l'État exerce sur la population.
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"Nous supposons que les millions de dollars que la Corée du Nord gagne chaque mois grâce à ce commerce sont destinés au régime de Kim Jong-un", a déclaré Shin Tong-Chan, avocat spécialisé dans les sanctions internationales et basé à Séoul, à Reuters.
Ce secteur d'activité est bénéfique pour la Corée du Nord, car les produits capillaires ne figurent pas sur la liste des marchandises sanctionnées par les Nations unies ou les États-Unis.
Toutefois, alors que les relations entre la Russie et la Corée du Nord s'intensifient en raison de la guerre en Ukraine, certains experts craignent que le pays de Vladimir Poutine n'utilise son droit de veto pour éviter des sanctions plus sévères.