La femme d’affaires milliardaire Truong My Lan condamnée à mort pour corruption et détournement de fonds
Truong My Lan, milliardaire et présidente du groupe Van Thinh Phat Holdings, un géant de l'immobilier vietnamien, est accusée d'avoir joué un rôle dans un système de fraude complexe s'élevant à 304 000 milliards de dongs (environ 11,5 milliards d'euros). Le 11 avril 2024, elle a été condamnée à mort.
Le secrétaire général du parti communiste Nguyen Phu Trong est convaincu que la corruption rampante, qui consiste à soudoyer ou à suborner une autorité afin d'obtenir un avantage, représente une menace sérieuse pour le parti communiste. Il a donc lancé une campagne anti-corruption en 2016.
Truong My Lan a commencé par vendre des produits cosmétiques sur un marché. Puis, en 1986, elle a profité de la période de réforme économique du Parti communiste, le Doi Moi, pour se lancer dans l'investissement immobilier. Une carrière impressionnante !
Dans les années 1990, le contrôle de l'État sur la propriété foncière était très strict et la corruption s'est accrue en conséquence. C'est à cette époque que Truong My Lan a consolidé les bases de son vaste portefeuille d'hôtels et de restaurants. Elle a également profité du statut d'Hô Chi Minh-Ville en tant que carrefour commercial du pays depuis l'époque où elle était la capitale du Sud-Vietnam, alors dénommée Saïgon.
Mais elle ne s'est pas limitée au secteur immobilier. Elle a également participé à la création de la Saigon Commercial Bank, en pilotant la fusion de trois banques en difficulté financière qui a permis de créer cette banque en 2011. Une véritable femme d’affaires.
Le journal en ligne vietnamien "VN Express" a rapporté que l'accusée avait été reconnue coupable par les juges du tribunal de Hô Chi Minh-Ville de corruption, de violation de la réglementation bancaire et de détournement de fonds dans le cadre d'un système frauduleux s'étendant sur une décennie. Elle encourt actuellement la peine de mort.
D’après un article de l’agence de presse en langue espagnole "EFE", la femme d'affaires exerçait un contrôle dominant de la banque en dirigeant indirectement jusqu'à 91 % des actions par l'intermédiaire de personnes de confiance qui suivaient ses instructions. Pourtant, officiellement, Truong My Lan ne possédait que 4 % des actions et n'occupait aucune fonction officielle au sein de la banque. Elle a été arrêtée en 2022.
Après avoir supervisé la fusion des trois banques qui ont formé la Saigon Commercial Bank, elle a accordé quelque 2 500 prêts à des sociétés fictives entre 2012 et 2022, détournant ainsi d'importantes sommes d'argent.
Mais ce n'est pas tout. Un haut fonctionnaire de la banque centrale est également jugé pour avoir accepté un pot-de-vin de 5 millions de dollars, selon la chaîne de télévision britannique "BBC News". En effet, Truong My Lan a aussi été accusée d'avoir versé des pots-de-vin pour éviter l'inspection de ses prêts.
Le bureau du procureur a déclaré que le préjudice causé par la fraude représente six pour cent du PIB du pays en 2023, et s'élève à 25,18 milliards d'euros, selon l’agence de presse en langue espagnole "EFE".
Truong My Lan a nié les accusations portées contre elle. Les autorités ont indiqué que 10 procureurs et environ 200 avocats avaient participé à l'opération, et que les preuves, regroupées dans 104 boîtes d'un poids total de six tonnes, avaient été présentées à la cour. Au total, 2 700 personnes ont été appelées à témoigner. Le gouvernement communiste a fait preuve d'une grande transparence dans cette affaire. Ci-dessus, photo d'une salle d'audience au Vietnam.
Le cas de Do Thi Nhan, condamnée à la prison à vie pour avoir accepté un pot-de-vin de 5,2 millions de dollars alors qu'elle était fonctionnaire de la Banque centrale, a été révélé. Par ailleurs, la démission en mars 2024 du président de la République socialiste du Vietnam, Vo Van Thuong (sur la photo), après avoir été impliqué dans des « irrégularités », est une autre conséquence de ce procès, bien que les autorités n'aient pas précisé les griefs. Enfin, son prédécesseur, Nguyen Xuan Phuc, a également démissionné en 2023.
Selon un article de la chaîne de télévision britannique "BBC News", Truong My Lan aurait été soutenue par des personnalités influentes qui ont exercé un contrôle dans les milieux commerciaux et politiques de Hô Chi Minh-Ville pendant des décennies, et ce d'après les déclarations de David Brown, un fonctionnaire du Département d'État américain à la retraite possédant une longue expérience du Vietnam. La photo montre l'une des propriétés appartenant à la femme d'affaires Truong My Lan.
"L'objectif de Nguyen Phu Trong et de ses alliés au sein du parti est de reprendre le contrôle de Saïgon, ou du moins d'empêcher qu'il ne lui échappe. Jusqu'en 2016, le parti de Hanoï a permis à ce réseau d'influence sino-vietnamien de garder le contrôle. Alors que les dirigeants communistes locaux semblaient suivre les directives du parti, ils exploitaient en réalité la ville à des fins personnelles", a ajouté David Brown.
Nguyen Phu Trong a fixé des objectifs économiques ambitieux pour le Vietnam jusqu'en 2045, y compris un partenariat avec les États-Unis. Le secrétaire général du parti communiste vietnamien a également consolidé le pouvoir conservateur du parti communiste. Mais il semble que ce mode de fonctionnement crée des frictions entre le maintien du parti et le développement économique, et augmente par ailleurs le risque de corruption. Il devrait quitter ses fonctions en 2026.
Certes, mais il y a un problème. Le modèle de croissance du Vietnam a longtemps été lié à la corruption. Qu'adviendra-t-il du système économique du pays si ce facteur est supprimé ? C'est ce qu'a déclaré un expert, qualifiant la situation de « paradoxe ».