Les frappes américaines contre les Houthis pourraient déboucher sur un conflit plus large avec l'Iran
Le 11 janvier dernier, les États-Unis et le Royaume-Uni ont lancé une série de frappes aériennes contre les rebelles houthis soutenus par l'Iran au Yémen. Que se passe-t-il et pourquoi cela pourrait-il déboucher sur un conflit plus large ?
Il est impossible de comprendre les événements dans la région si l'on ne sait pas qui sont les Houthis et ce qu'ils ont fait pour déclencher des frappes militaires de la part des pays occidentaux, y compris l'Australie et le Canada.
Les Houthis sont une milice issue de la minorité chiite du Yémen. Soutenus par l'Iran, ils luttent pour le contrôle du pays depuis 2014, selon 'BBC News'. Cependant, leurs origines remontent aux années 1990.
Après les attaques du 7 octobre contre Israël et la guerre qui a suivi, les Houthis ont juré qu'ils soutiendraient le Hamas en prenant pour cible tout navire se rendant en Israël. C'est ainsi que le transport maritime commercial en Mer Rouge a été attaqué.
Les frappes de missiles balistiques et de drones sur les navires commerciaux traversant la mer Rouge se sont multipliées, augmentant d'environ 500 % entre novembre et décembre 2023, selon 'BBC News'. De quoi susciter une réaction de la part des Occidentaux.
"La menace est devenue si forte que les principales compagnies maritimes ont cessé de naviguer dans la région et que les coûts d'assurance ont été multipliés par 10 depuis le début du mois de décembre", indique la 'BBC'. L'économie mondiale s'en trouve logiquement affectée.
Certaines compagnies maritimes comme la Mediterranean Shipping Company, Maersk et Hapag-Lloyd, ainsi que des compagnies pétrolières comme BP, ont commencé à détourner leurs navires de la Mer Rouge. Un gros problème, car cette voie maritime représente 15 % du commerce mondial.
Selon 'Axios', les attaques ont provoqué une flambée des prix du transport maritime au niveau mondial : les tarifs au comptant pour le transport maritime vers l'Asie et l'Europe du Nord avaient augmenté de 173 % au 5 janvier, tandis que ceux pour l'Amérique du Nord avaient bondi de 52 %.
En décembre, Washington a accusé l'Iran d'être "largement impliqué" dans les attaques des Houthis contre la navigation commerciale en Mer Rouge. De quoi faire craindre une escalade en cas de riposte destinée à mettre fin aux agissements du groupe rebelle.
"Nous savons que l'Iran a été largement impliqué dans la planification des opérations contre les navires commerciaux en Mer Rouge", a déclaré Adrienne Watson, porte-parole du Conseil de sécurité nationale, selon 'CBS News'.
La situation a finalement atteint un point critique lorsque Joe Biden a ordonné des frappes aériennes le 11 janvier, dans ce qu'il a déclaré être "une réponse directe aux attaques sans précédent des Houthis contre des navires internationaux en Mer Rouge", selon 'CNN'.
"Les forces militaires américaines, en collaboration avec le Royaume-Uni et avec le soutien de l'Australie, du Bahreïn, du Canada et des Pays-Bas, ont mené avec succès des frappes contre plusieurs cibles utilisées par les rebelles houthis au Yémen pour compromettre la liberté de navigation sur l'une des voies navigables les plus vitales au monde", a déclaré Biden dans un communiqué.
Reste à savoir si ces frappes aériennes ont permis de réduire le potentiel de nuisance des Houthis en Mer Rouge. Le 'New York Times' a indiqué le 14 janvier que les capacités du groupe rebelle à attaquer les bateaux de navigation étaient intactes.
L'Iran a condamné les frappes anglo-américaines contre les Houthis, affirmant qu'elles alimenteraient "l'insécurité et l'instabilité" dans la région, selon 'Reuters'.
Une deuxième série de frappes a été effectuée le 12 janvier, décrite comme une "action de suivi sur une cible militaire spécifique" par une déclaration publiée sur le compte 'X' du commandement central américain.
Photo : Wiki Commons / U.S. Air Force photo
"Cette nouvelle frappe aura une réponse ferme, forte et efficace", a déclaré Nasruldeen Amer, le porte-parole des Houthis, à 'Al Jazeera'. Il a ajouté que ces frappes n'avaient fait aucun blessé ni causé de dommages matériels.
Malgré la puissance écrasante des États-Unis et de leurs alliés, il est probable que les rebelles ripostent, selon l'ancien ministre britannique de la Défense, Sir Malcolm Rifkind. "Les Houthis voudront prouver que la dissuasion ne fonctionne pas", a-t-il déclaré à 'The Independent'.
"Je serais donc très surpris qu'il n'y ait pas au moins un autre incident. Il pourrait ne pas se produire immédiatement, mais dans une semaine ou dix jours. Ou dans les 48 prochaines heures. Lorsque cela arrivera, il y aura une nouvelle frappe américaine", a ajouté Rifkind.
Photo : Wiki Commons / U.S. Navy photo
La suite des événements est encore inconnue, notamment la réaction de l'Iran si l'escalade entre les États-Unis et les Houthis se poursuit. Une position dure de Téhéran pourrait entraîner toute la région dans la guerre.
Le président Biden a envoyé un "message privé" aux Iraniens au moment des frappes aériennes contre les Houthis, pour leur faire savoir que les États-Unis étaient "confiants" et "bien préparés", bien qu'aucun autre détail n'ait été donné, selon 'BBC News'.
L'Iran continue de nier toute implication dans les attaques en Mer Rouge. Cependant, les tensions dans la région ont atteint un tel niveau qu'une désescalade est difficile à envisager si les Houthis mettent à exécution leurs désirs de revanche.