Les pénuries et déséquilibres qui menacent l’économie mondiale… et votre porte-monnaie !
Après un rebond spectaculaire en 2021, qui a suivi le plongeon de 2020 consécutif à la crise du Covid-19, l’économie mondiale semble de nouveau tourner à un rythme normal. Mais entre l’inflation, les pénuries et diverses incertitudes géopolitiques, les nuages s’accumulent, ce qui pourrait avoir un impact majeur sur l’activité, mais aussi sur votre pouvoir d’achat.
On la croyait disparue depuis longtemps, et pourtant l’inflation fait son grand retour dans les pays développés. Aux États-Unis, la hausse des prix à la consommation a atteint 7% en 2021, du jamais vu depuis quarante ans dans la première économie mondiale.
En France, la progression se limite à 2,8% mais la moyenne de la zone euro se situe autour de 5%, soit un record depuis l’introduction de la monnaie unique. Autant de pouvoir d’achat en moins pour les consommateurs et d’économies parties en fumée pour les épargnants !
Certains économistes ont mis en cause les politiques de relance adoptées dans les pays développés à la suite de la récession de 2020. La stimulation excessive de la demande et l’injection massive d’argent dans l’économie exerceraient une pression à la hausse sur les prix, poussant les salariés à revendiquer des hausses de salaires, lesquelles maintiendraient la hausse des prix dans une spirale sans fin.
Compte tenu de la relative faiblesse du chômage et du manque de main d’œuvre dans certains métiers comme l’informatique, les salaires augmentent plus vite que l’offre de biens disponibles, ce qui alimente l’inflation. Par ailleurs, le phénomène de « grande démission » raréfie encore plus la main d’œuvre disponible.
Dans certains pays comme la France, les chaînes logistiques reposaient en grande partie sur des travailleurs précaires qui n’ont pas été réembauchés lorsque la pandémie a éclaté et qui travaillent dans d’autres domaines depuis. Il est donc très difficile pour les entreprises de faire de nouveau tourner la machine à plein régime.
Mais il existe d’autres raisons à la hausse généralisée des prix. L’augmentation des besoins mondiaux en énergie, la sortie du nucléaire dans certains pays et la fin programmée des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) au profit d’énergies renouvelables créent un déséquilibre entre l’offre et la demande d’énergie dans le monde. Vous avez déjà dû le remarquer en ouvrant votre facture d’électricité ou de gaz.
Mais c’est surtout la crise très aiguë entre la Russie et l’Ukraine qui représente la plus grosse incertitude sur le marché mondial de l’énergie. Une invasion russe du voisin ukrainien interromprait de fait les livraisons de gaz de Russie vers l’Europe, ce qui réduirait encore davantage l’offre et pousserait les prix encore plus haut.
Indicateur emblématique, le prix du baril de pétrole vient de franchir de nouveau la barre des 100 dollars, alors qu’il était passé en dessous de zéro au cœur de la première vague de Covid-19 au printemps 2020. Et les prix à la pompe s'en ressentent.
L’énergie étant le nerf de toute l’économie, la hausse de son coût se diffuse à une grande variété d’autres produits dont la production et le transport nécessitent une grande quantité d’énergie.
Mais l’énergie n’est pas la seule concernée par l’inflation ou la réduction de l’offre. La pandémie a entraîné des ruptures majeures dans le commerce international et de nombreuses matières premières manquent à l’appel : cuivre, lithium, nickel et terres rares…
Conséquence de ce manque de matériaux essentiels, une pénurie de composants frappe l’industrie depuis de longs mois. Cela conduit à des hausses de prix ou à des délais d’attente plus longs pour les producteurs, ce qui restreint l’offre et renforce en retour l’inflation.
Le manque de semi-conducteurs est particulièrement douloureux dans le secteur automobile. Plusieurs constructeurs sont allés jusqu’à fermer temporairement certaines usines, comme celle de la Toyota Yaris dans le nord de la France à la fin de l’été dernier, faute de disposer de l’ensemble des composants nécessaires à la production.
Par ailleurs, le monde est largement affecté par les difficultés du transport de marchandise liées aux restrictions de circulation mises en place pour lutter contre la pandémie. Partout, les difficultés d’approvisionnement entraînent des pénuries, qui se traduisent bientôt par une augmentation des prix. De quoi ralentir la reprise mondiale tout en pesant fortement sur le pouvoir d’achat.
Les pénuries ont frappé des secteurs économiques très divers : en Allemagne, le niveau de production industrielle est très inférieur à celui des commandes, et pas seulement dans l’automobile. Au Royaume-Uni, les pubs ne peuvent plus proposer certaines marques de boissons à leurs clients.
Les déséquilibres actuels proviennent d’un déséquilibre entre une offre contrainte et une demande qui repart en flèche, mais aussi de l’évolution de la demande elle-même. Les difficultés d’approvisionnement de l’industrie automobile doivent beaucoup à l’augmentation spectaculaire de la demande d’équipements informatiques. Les différents secteurs sont en compétition pour obtenir en priorité les précieux semi-conducteurs.
Cerise sur le gâteau, les incertitudes liées à la pandémie ne sont pas entièrement levées, ce qui rend très difficile la planification pour les entreprises. En partie bloquée, l’économie mondiale avance à tâtons tout en devant supporter des hausses régulières de prix. Personne ne sait encore si la suite de l’année 2022 sera marquée par une stabilisation ou par un accroissement des déséquilibres.