Les Légions d'honneur les plus polémiques en France
Créée à l’époque napoléonienne, la Légion d’honneur vise à récompenser des personnalités méritantes par leurs actions en France. Mais certaines remises de cette décoration créent parfois la polémique, comme l’actualité récente l’a rappelé. Un aperçu en images des Légions d’honneur les plus controversées des dernières décennies.
Jeff Bezos, le fondateur et ancien président du géant du e-commerce Amazon, a été décoré en toute discrétion de la Légion d’honneur par Emmanuel Macron le 16 février 2023, comme l’a révélé ‘Le Point’. La présidence de la République n’avait pas inscrit cette décoration à l’agenda officiel mais a elle salué le rôle de Bezos comme « partenaire des initiatives pour la protection du climat et de la biodiversité menées par la France, en particulier sur la protection des forêts. »
L’information a provoqué un tollé dans une partie de la sphère politique, Amazon étant très controversé pour son impact tant social qu’environnemental. Le leader du Parti communiste français Fabien Roussel (sur la photo) a réagi vivement sur Twitter : « Emmanuel Macron remet donc la légion d’honneur à Jeff Bezos, patron d’Amazon, exploiteur mondial et roi de l’optimisation fiscale. »
Mais ce n’était pas la première fois qu’une remise de Légion d’honneur suscitait une polémique en France. En 2022, une vague d’indignation avait accompagné la décoration d’Agnès Buzyn, l’ancienne ministre de la Santé très décriée pour avoir minimisé la gravité de la pandémie avant de quitter son poste pour se présenter aux élections municipales à Paris.
Et que dire, alors que la guerre en Ukraine continue de faire rage, de la Légion d’honneur accordée à Vladimir Poutine par Jacques Chirac en 2006 ? Les deux chefs d’États étaient par ailleurs liés par une forte relation personnelle.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que la France honorait le leader d’un régime autoritaire. Le même Jacques Chirac avait décoré très discrètement le dictateur syrien Bachar El-Assad en 2001. Le gouvernement français a lancé des années après une procédure de retrait de cette Légion d’honneur, mais il a été si lent que c’est finalement Assad lui-même qui a rendu la décoration.
Mais Jacques Chirac n’a pas eu le monopole des Légions d’honneur douteuses. En 2016, François Hollande a décoré l’ancien prince héritier saoudien Mohammed Ben Nayef Al Saoud. Une décision très discutable compte tenu de la situation des droits humains et de la condition des femmes en Arabie saoudite.
En 2020, Emmanuel Macron a quant à lui remis la Légion d’honneur à Abdel Fatah al-Sissi, le militaire qui gouverne l’Égypte d’une main de fer. Plusieurs personnalités comme l’écrivain italien Corrado Augias avaient rendu leur propre décoration en signe de protestation.
Un autre dictateur décoré par la France : le président gabonais Ali Bongo, distingué par Nicolas Sarkozy en 2010. L’information n’avait pas filtré dans les médias français mais avait été révélée par ‘Gabon Matin’.
Une décoration qui a fait tache compte tenu de l’histoire douloureuse de la collaboration et de la déportation : celle de Maurice Papon, haut fonctionnaire du régime de Vichy et l’un des rares Français dont la Légion d’honneur a été retirée. Décoré par Charles De Gaulle alors qu’il était préfet de police de Paris dans les années 1960, Papon a perdu d’office cette distinction lors de sa condamnation pour complicité de crimes contre l’humanité en 1998.
Francisco Franco est une autre figure de cette période trouble qui a reçu la Légion d’honneur. Il a été décoré en 1928 alors qu’il n’était qu’un général de l’armée espagnole. Mais Benito Mussolini et Nicolae Ceausescu ont aussi été honorés par cette distinction.
Lors de son procès en 2010, l’ancien dictateur du Panama Manuel Noriega portait encore fièrement sa Légion d’honneur, à l’époque très difficile à retirer à des personnalités non françaises. Mais son cas a permis une évolution bienvenue de la jurisprudence qui a rendu possible le retrait de la décoration à des étrangers.
Mais les hommes politiques n’ont pas l’exclusivité des Légions d'honneur controversées. Jacques Servier, le fondateur des laboratoires du même nom, avait été décoré par François Mitterrand en 1985 et promu en 2009, peu de temps avant que n’éclate le scandale du Mediator. Les proches des victimes de ce médicament mortel ont été choqués que Servier (et ses conseillers impliqués dans l’affaire) conserve ensuite la décoration.
L’ancien numéro 2 de la police judiciaire de Lyon s’était vu décorer de la Légion d’honneur par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, en 2004. Mais le superflic a perdu sa médaille en 2018 après avoir été condamné en appel pour corruption et association de malfaiteurs.
L’ancien couturier star de Christian Dior, John Galliano, décoré par Nicolas Sarkozy en 2009, a été privé de sa Légion d’honneur quelques années plus tard par François Hollande. Le Britannique avait été condamné par la justice après avoir tenu des propos antisémites et avait dû quitter la maison Dior pour les mêmes raisons.
Les abus commis par Harvey Weinstein à l’encontre de plusieurs actrices sont connus depuis 2017. Mais saviez-vous que le producteur américain avait reçu la Légion d’honneur après le succès du film « The Artist » en 2012 ? Un retrait de la décoration est aujourd’hui envisagé par l’Élysée.