Lutte contre les inégalités : le Canada va-t-il mettre en place un revenu de base universel ?
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales du Canada examine actuellement un projet de loi visant à établir un cadre national pour un revenu de base vital garanti dans le pays. Le Canada va-t-il se doter d'un revenu de base universel ? En effet, selon certaines théories, l'adoption d'un revenu de base universel est l'une des meilleures stratégies pour lutter contre la pauvreté.
En Finlande, où une étude sur le revenu universel a été menée en 2017 et 2018, les résultats ont été positifs : selon l'université d'Helsinki qui a étudié les résultats de cette expérience, les personnes ayant bénéficié de cet avantage ont montré "moins de problèmes de santé, moins de stress et une meilleure capacité de concentration", comme le souligne Clément Back dans un article pour l'Écho de Belgique.
Le concept de revenu de base universel est facile à comprendre : l'idée promet qu'un gouvernement fournira à tout le monde un revenu de base pour couvrir le coût de la vie, sans contrepartie ni contrôle des ressources. Et ce à tout le monde, que la personne travaille ou non, jusqu'à son décès.
Le concept repose sur une variété de méthodes de financement, mais celle qui retient l'attention de la plupart des gens est la fiscalité. C'est ce que le Comité sénatorial permanent des finances nationales du Canada est en train d'examiner dans le cadre de son projet de loi S-233.
Photo : Wiki Commons / Hutima - Travail personnel
Présenté le 17 octobre, Journée internationale pour la lutte contre la pauvreté, le projet de loi S-223 vise à établir un cadre national pour le développement de ce que ses auteurs appellent un "revenu de base vital garanti".
Un communiqué de presse de la sénatrice Kim Pate indique que la commission a entendu un certain nombre d'experts sur la question du revenu de base vital garanti, dont l'ancienne première ministre de l'Ontario, Kathyln Wynne, et plusieurs économistes.
Tous les experts invités ont reconnu que le pays était confronté à des incertitudes économiques, sociales, sanitaires et environnementales croissantes, mais ont estimé qu'il était temps de mettre en place un revenu national garanti de subsistance.
"Les améliorations tangibles dans la vie des gens et les résultats que nous commencions à observer grâce au projet pilote de revenu de base de l'Ontario comprenaient une augmentation des placements professionnels et de la participation à la vie de la communauté", a expliqué Kathyln Wynne.
Kathyln Wynne a également souligné que le projet pilote de revenu de base de l'Ontario, lancé par son gouvernement lorsqu'elle était au pouvoir, a également permis d'améliorer la réussite scolaire ainsi que la santé physique et mentale des participants au programme.
Jiaying Zhao, titulaire de la chaire de recherche du Canada sur la durabilité comportementale, a également apporté son expertise en la matière : il a expliqué qu'il suffisait d'un montant de seulement 8 277 dollars (5607 euros) par an et par personne pour réduire le sans-abrisme et la dépendance sociale.
"Des centaines d'études réalisées au cours des 50 dernières années ont montré la même tendance : amélioration du bien-être, de l'état de santé, des fonctions cognitives, de la sécurité alimentaire, réduction du taux de criminalité et diminution de la consommation d'alcool ou de drogues", a déclaré le Dr Zhao aux membres de la commission.
Le projet de loi S-233 est examiné par la commission sénatoriale permanente depuis plusieurs semaines et a été présenté avec un projet de loi complémentaire à la Chambre des communes, le projet de loi C-223.
Si les deux projets de loi sont adoptés, ils instaureront un revenu de base garanti pour tous les Canadiens âgés de plus de 17 ans, selon UBI Works, qui invite les Canadiens à signer une pétition en faveur des projets de loi S-233 et C-223.
Andy Takagi, du Toronto Star, a rapporté que l'élan en faveur de l'instauration d'un revenu de base garanti au Canada s'est considérablement renforcé depuis la pandémie de COVID-19, lorsque des milliers de Canadiens ont reçu chaque mois la prestation d'intervention d'urgence du Canada.
Takagi a ajouté que si les projets de loi étaient adoptés, toute personne de plus de 17 ans dans le pays recevrait un revenu du gouvernement, ce qui signifie que les travailleurs temporaires, les résidents permanents et les réfugiés pourraient également réclamer leur dû au gouvernement.
Le cadre proposé ne remplacerait pas non plus les autres programmes sociaux du Canada, tels que les soins de santé gratuits et les prestations d'invalidité. En avril 2021, le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, a constaté qu'un montant de 17 000 dollars permettrait de réduire de moitié les taux de pauvreté au Canada.
Photo : Twitter @yzgiroux
Cependant, un tel programme coûterait au gouvernement environ 85 milliards de dollars par an et CBC News a noté qu'Yves avait dit aux sénateurs à l'époque qu'il serait peut-être nécessaire de repenser les programmes sociaux du pays pour financer un tel programme.
Une réduction de l'aide sociale au niveau provincial ainsi qu'une modification des crédits d'impôt tels que le crédit pour la TPS (une aide pour récupérer la taxe sur les produits et services) ont tous été proposés comme des solutions possibles par Yves. Mais une telle politique a-t-elle des chances d'être adoptée au Canada ?
Même si le projet de loi S-233 est adopté par le Sénat, la Chambre des communes devra encore étudier et adopter sa proposition de loi, et l'idée d'un revenu de base universel risque de se heurter à bien d'autres résistances. Mais, au moins, un débat s'est engagé sur la question et pourrait bien inspirer d'autres pays qui luttent contre la pauvreté de leurs citoyens.