Réchauffement climatique : pourquoi les émissions de CO2 repartent-elles à la hausse ?
L'approbation par le gouvernement de Biden du projet "Willow", un investissement pétrolier de 7,2 milliards d'euros en Alaska, a suscité une levée de boucliers de la part des écologistes. Selon le 'New York Times', beaucoup ont accusé les États-Unis de "trahir" leur promesse de s'éloigner des combustibles fossiles.
Toutefois, selon les informations fournies par Rystad Energy et recueillies par le 'New York Times', Willow n'est pas tout seul. Il ne représente qu'une fraction des centaines de nouveaux projets d'extraction de pétrole et de gaz approuvés au cours de l'année écoulée dans le monde.
Les investissements dans les industries des combustibles fossiles sont restés importants. Selon le 'New York Times', le plus grand projet d'extraction pour 2022 et 2023 devrait produire environ 8 milliards de barils de pétrole au Qatar (l'un des pays les plus riches).
Le 'New York Times' indique que l'industrie ''a rebondi à des niveaux de croissance prépandémiques'' et que la demande d'énergies fossiles augmente. Selon les informations fournies par 'Our World in Data', un pic a été atteint en 2019 et s'est stabilisé en 2020 et 2021.
Les 30 premiers pays ayant des projets pétroliers pour 2022-2023 totalisent des centaines de milliards de nouveaux barils. Le Qatar, l'Arabie saoudite, le Brésil, les Émirats arabes unis et la Norvège ont les investissements les plus importants. Les cinq premiers pays réunis produiront environ 1 180 milliards de litres d'or noir !
Selon les informations fournies par le site 'Our World in Data', l'énergie produite par les combustibles fossiles est en hausse. C'est le cas notamment du charbon et du gaz qui ont retrouvé, voire dépassé, les niveaux d'avant la pandémie. Le pétrole suit également cette voie...
Au cours des cinq dernières années, entre 2018 et 2023, les émissions sont en hausse, malgré les avertissements de la communauté scientifique. ''Le rythme et l'ampleur des mesures prises jusqu'à présent, ainsi que les projets actuels, sont insuffisants pour lutter contre le changement climatique'', indique le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) pour 2023.
Des organisations mondiales telles que le GIEC et la Banque mondiale ont appelé à investir davantage dans les énergies durables et d'atténuer le changement climatique. Comparé aux ressources déployées pour les grands projets pétroliers comme "Willow", l'argent destiné à résoudre le problème est loin d'être suffisant.
Les experts du GIEC ont insisté, dans leur rapport 2023, sur le fait qu'il y avait "suffisamment de capital mondial pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre si les barrières existantes sont rapidement réduites". Cependant, le financement doit augmenter de manière significative au cours de la prochaine décennie.
Mais, l'investissement n'est pas tout. L'exploitation doit également cesser. Le GIEC affirme que pour maintenir l'augmentation de la température de la planète en dessous de 2,7° C, il faut faire attention à nos réserves. En aucun cas celles-ci ne peuvent être brûlées. Cela représente 80 % du charbon, 50 % du gaz et 30 % du pétrole.
Le GIEC a également calculé que nous devons diminuer les émissions au cours des sept prochaines années pour éviter de dépasser la limite de température précédemment citée (2,7 ° C). Les experts ont appelé à ''des réductions profondes, rapides et durables des gaz à effet de serre dans tous les secteurs''.
Selon le rapport du GIEC, la planète subit déjà une augmentation de température et les conséquences sont déjà visibles. Certains impacts climatiques sont déjà si graves que nous ne pouvons pas nous y adapter, ce qui entraîne des pertes et des dommages notamment au niveau de l'environnement.
Les conditions météorologiques extrêmes rendent déjà certains pays et territoires difficiles à habiter. "Au cours de la dernière décennie, les décès dus aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes ont été 15 fois plus nombreux dans les régions très vulnérables", a déclaré Aditi Mukherji, l'un des 93 auteurs du rapport, dans un communiqué de presse du GIEC.
Toutefois, ce modèle de production s'est également avéré être un problème pour la durabilité à long terme de l'économie, selon un rapport de la Banque mondiale. Le document suggère que l'investissement dans les secteurs durables est l'une des trois actions clés qui pourraient augmenter la croissance au cours de la prochaine décennie.
La Banque mondiale a insisté sur le fait que la stimulation de l'investissement durable est essentielle au bien-être de l'économie. Elle a appelé à éliminer les restrictions d'accès aux biens et services respectueux de l'environnement et les préjugés à l'égard des actifs à forte intensité de carbone.
La Banque mondiale craint que la vision à court terme de certaines politiques n'entraîne l'économie mondiale dans une "décennie perdue", avec un ralentissement de la croissance à des rythmes jamais vus auparavant.
Ce scénario fait peser une incertitude économique et environnementale sur l'avenir de la planète. Il existe peut-être de meilleurs moyens de changer cette tendance plutôt que d'augmenter la production de pétrole et de charbon.