Un plan ferroviaire à 100 milliards d’euros : quel est l’avenir du train en France ?
Le train est-il un moyen de transport durable ? Oui, si l’on considère ses émissions de CO2 : pour un trajet équivalent, il émet 11 fois moins de gaz à effet de serre que l’automobile et même 130 fois moins que l’avion, selon ‘Statista’.
Comme la plupart des États occidentaux, la France vise la neutralité carbone à l’horizon 2050. Selon ‘Alternatives économiques’, cela nécessite une augmentation du trafic ferroviaire dans le pays de 27 % d'ici à 2030 et de 79 % d'ici à 2050 par rapport au niveau de 2022.
Le train est en effet le moyen de transport privilégié pour rendre la mobilité moins polluante. Les pouvoirs publics souhaitent donc le substituer partiellement à la voiture et à l’avion. Une loi votée en 2022 a d’ailleurs concrétisé cet objectif : désormais, toute liaison aérienne sur le territoire français est interdite s’il existe une alternative en moins de 2h30 en train.
La France dispose de plusieurs atouts en matière ferroviaire : en plus du très rapide TGV qui relie ses principales agglomérations, elle a le deuxième réseau ferré le plus étendu d’Europe, avec environ 29 000 kilomètres de voies, selon ‘Statista’.
Cependant, l’investissement dans la construction et l’entretien du réseau reste insuffisant : selon l’association allemande ‘Allianz pro Schiene’, la France a dépensé 45 euros par habitant dans les infrastructures ferroviaires en 2021, contre 124 euros pour l’Allemagne, 413 euros pour la Suisse et même 607 euros pour le Luxembourg.
C’est pour corriger ce manque et pour atteindre les objectifs climatiques de la France que la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé le 24 février dernier un plan d’investissement de 100 milliards d’euros d’ici à 2040.
Ce montant correspond à celui demandé par la SNCF, l’opérateur ferroviaire public. Son président Jean-Pierre Farandou (sur la photo) avait évoqué en juillet dernier un montant de 100 milliards d’euros sur 15 ans afin de doubler la part du train dans les déplacements des Français.
L’enveloppe de 100 milliards d’euros servira notamment à la création, dans une dizaine de grandes villes, de « RER métropolitains » inspirés du réseau francilien. Ce projet fait suite à une annonce faite par le président de la République en novembre 2022.
« Derrière le concept de RER, c’est l’usage du train qui va évoluer, avec des trains plus nombreux, plus réguliers et desservant mieux les bassins de vie », selon les annonces du gouvernement citées par ‘Capital’.
L’exécutif souhaite aussi un meilleur maillage ferroviaire du territoire : « Il s’agit de construire des réseaux de transport complets pour les Français. C’est permettre de se rapprocher d’une gare ou développer les transports en commun là où ils sont absents. »
Mais la création de RER locaux est aussi réalisée à l’initiative des villes. Strasbourg a inauguré son Réseau Express Métropolitain Européen (REME) fin 2022, tandis que Bordeaux a engagé des consultations visant à la création de nouvelles lignes de trains régionaux d’ici à 2030.
Mais en plus de la création de nouvelles lignes, il s’agit aussi de moderniser le réseau existant et d’assurer la pérennité de petites lignes peu fréquentées, mais dont l’existence peut être vitale pour leurs usagers.
Un autre chantier ferroviaire des pouvoirs publics est la « relance du train de nuit » évoquée par la cheffe du gouvernement le 24 février. Il s’agit d’une véritable demande de la population et la SNCF a d’ailleurs entamé une reprise des trajets nocturnes ces dernières années.
Le paysage ferroviaire français est en constante évolution depuis plusieurs années. En 2018, une première réforme a adapté l’organisation du train en France à la législation européenne : la SNCF a été transformée en société anonyme et le statut de cheminot a disparu pour les nouvelles embauches.
Mais le point principal de la réforme a été l’ouverture à la concurrence afin de faire de l’Europe un grand marché ferroviaire et de diminuer progressivement les prix. La SNCF peut ainsi partir à l’assaut des réseaux étrangers tandis que des opérateurs allemands, italiens ou espagnols ont ouvert des liaisons sur le sol français.
En plus des grands opérateurs nationaux comme la Deutsche Bahn ou la Renfe espagnole, de petites compagnies apparues récemment cherchent à dynamiser l’offre. Afin d’améliorer la liaison entre certaines villes, la compagnie privée « Le Train » vise à développer une offre complémentaire, d’abord dans l’ouest du pays.
Le directeur général de cette société, Alain Getraud, un ancien cadre de la SNCF, a indiqué à ‘La Croix’ que Le Train souhaite créer 5 lignes régionales à grande vitesse, comme Bordeaux-Nantes ou Bordeaux-Rennes, en évitant le « trafic en étoile, passant quasi systématiquement par Paris ».
Le train est-il l’avenir de la mobilité, en France comme ailleurs ? La réponse semble évidente, compte tenu de la nécessité de décarboner les transports. Mais la réalisation de cet objectif passera par des investissements élevés et par le développement de nouvelles offres, tant au niveau local que national. Attention au départ !