Viktor Bout, le marchand d'armes qui pourrait être une monnaie d'échange entre Poutine et Biden
Le Russe Viktor Bout purge actuellement une peine de 25 ans dans une prison américaine pour avoir vendu des armes aux FARC, la guérilla colombienne aujourd'hui dissoute. Il est surnommé le "marchand de la mort".
Il était considéré comme le plus grand marchand d'armes du monde. Mais en réalité, il a été traqué pour une affaire "mineure", car la vente d'armes aux FARC qui lui a valu d'être jugé n'est rien en comparaison de ses opérations dans plusieurs guerres africaines. Poutine réussira-t-il à ouvrir sa cellule et à le ramener en Russie ?
Viktor Bout est actuellement âgé de 55 ans et a purgé la moitié de sa peine. Il a été condamné en 2012 par un tribunal de New York. Lorsqu'il a été jugé, il a déclaré par l'intermédiaire de son avocat : "Ça ne s'arrêtera pas là". Une tournure inattendue des événements (avec en toile de fond la guerre en Ukraine) pourrait lui donner raison...
Viktor Bout pourrait être renvoyé en Russie dans le cadre d'un échange de prisonniers. Selon des médias tels que le New York Times, Poutine serait prêt à récupérer Bout en échange de Brittney Griner (photo), une star du basket-ball condamnée à Moscou pour possession de substances illicites, dans un procès que l'administration américaine considère comme une sorte de revanche face à la position de Biden dans la guerre en Ukraine.
La Russie a toujours affirmé que la condamnation de Viktor Bout aux États-Unis était "partiale" et "infondée".
Dans un article publié dans Foreign Policy, Michael Braun (ancien chef des opérations de la DEA) écrit à propos de Viktor Bout : "On pense qu'il est un ancien officier de la direction des renseignements militaires de Moscou, le GRU, et qu'il a commencé à vendre des armes de fabrication soviétique dans les années 1990."
Michael Braun ajoute : "En 2003, il était devenu le plus grand marchand d'armes du monde, fournissant des armes à des organisations terroristes, des groupes d'insurgés, des cartels et des régimes voyous."
Par ailleurs, Michael Braun (avec l'autorité d'avoir été chef de la DEA et d'avoir bien connu Bout) est opposé à la remise du trafiquant : "Avant de remettre Viktor Bout dans les bras de Moscou, j'espère que Biden réfléchira attentivement à la menace que cet échange pourrait représenter pour les intérêts américains".
Viktor Bout est né en 1967 à Douchanbé, dans l'ancienne république soviétique du Tadjikistan. Il a rejoint l'armée et, selon les services de renseignement américains et britanniques, était un espion du KGB. Il l'a cependant toujours nié.
Une autre partie de sa légende est son immense capacité à apprendre des langues : on dit qu'il parle couramment l'anglais, le français, le portugais, l'ouzbek et plusieurs langues africaines.
Ajoutez à ce portrait le fait que l'on a toujours attribué à ce marchand d'armes un caractère doux et calme, peu enclin aux accès de colère ou aux excès.
La figure de Viktor Bout a inspiré le personnage joué par Nicholas Cage dans "Lord of War" (2005). Un homme tranquille qui vendait des lance-missiles comme s'il s'agissait d'un travail de bureau.
Bien sûr, au-delà de la légende ou de son personnage hollywoodien, il y a le poids des milliers de morts que Viktor Bout porterait sur ses épaules. Sauf si l'on écoute son propre récit, dans lequel il se déclare innocent de toute accusation.
Viktor Bout est crédité d'avoir vendu des armes à Al-Qaïda, aux Talibans, à des dictateurs africains tels que Mobutu Sese Seko, Charles Taylor ou Kadhafi, ... Dans son rôle d'homme d'affaires, il n'a appliqué aucun principe de discrimination morale ou politique envers un client.
Bien sûr, Viktor Bout a aussi parfois été du bon côté : son palmarès comprend une collaboration avec le gouvernement français sur une mission humanitaire au Rwanda et d'autres opérations humanitaires avec des institutions telles que le Programme alimentaire mondial des Nations unies. Ceux qui ont payé ont toujours eu son aide.
La façon dont Viktor Bout avait tendance à opérer dans des zones de non-droit - sans exactement enfreindre la loi lorsqu'il vendait des armes à certains gouvernements - a également été beaucoup soulignée dans ses différentes biographies journalistiques.
Sa capacité à sortir indemne de son activité notoire de marchand d'armes aux plus offrants lui vaut le surnom d'"intouchable".
Ce n'est pas que Viktor Bout ait été explicitement protégé par le gouvernement russe dans ses activités, mais son passé dans l'armée russe et, on le suppose, certains contacts, l'ont fait apparaître comme un élément proche du pouvoir en Russie.
Viktor Bout est tombé dans un piège qui lui a été tendu en Thaïlande. Lors d'une opération conjointe entre plusieurs pays, des agents de police se sont fait passer pour des guérilleros des FARC.
Le New York Times titrait "Les États-Unis et la Russie sont prêts à négocier la libération de Griner" et précisait dans cet article que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, serait impliqué dans ces négociations. Le nom de Viktor Bout serait sur la table.
La femme de Viktor, Alla Bout, est l'un de ses plus grands soutiens. Au sujet de ses visites en Amérique latine dans les années 2000, elle a affirmé que son mari n'allait pas établir des relations avec les guérillas, mais seulement prendre des cours de tango, selon un rapport de la BBC.
Si Viktor Bout parvient finalement à sortir de prison grâce à un échange de prisonniers, sa biographie ajoutera un nouveau chapitre à la légende. Bien entendu, la question est la suivante : quel sort Poutine réserve-t-il à celui que l'on appelle le "marchand de mort" ? Quel est l'intérêt du dirigeant russe pour Viktor Bout ?