Poutine est un homme recherché : le dirigeant russe ira-t-il en prison pour crimes de guerre contre des enfants ?
Le 17 mars 2023, la Cour pénale internationale (CPI) a lancé un mandat d'arrêt contre le président russe Vladimir Poutine.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, on a beaucoup parlé de la responsabilité de Poutine dans les crimes de guerre commis dans le pays, et il semble maintenant qu'il doive faire face aux conséquences de ses actes.
Qu'il s'agisse d'approuver le bombardement de civils ou de torturer des Ukrainiens dans les zones occupées par la Russie, le monde entier a eu les yeux rivés sur les actions de Vladimir Poutine en Ukraine.
Cependant, les crimes qui ont finalement poussé la CPI à délivrer un mandat d'arrêt à l'encontre du président russe et de l'un de ses fonctionnaires au Kremlin sont plus graves encore...
La Cour pénale internationale a délivré un mandat d'arrêt à l'encontre de Vladimir Poutine et de Maria Alekseyevna Lvova-Belova, fonctionnaire du Kremlin, en raison de leur implication présumée dans la déportation et le transfert illégaux d'enfants ukrainiens des régions occupées de l'Ukraine vers la Russie.
Cependant, le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale à l'encontre de Poutine n'est qu'un petit pas vers la justice. Il ne sera pas facile de traduire le président Poutine en justice, même si les Nations unies semblent croire qu'il existe suffisamment de preuves pour accuser Poutine de crimes de guerre en Ukraine.
Les poursuites engagées contre le président russe sont complexes et, tant que Poutine restera en Russie, il est peu probable qu'il soit arrêté. Il est peu vraisemblable que le Kremlin remette de sitôt son très estimé dirigeant à la CPI.
Le mandat de la CPI a été délivré après que l'Observatoire des conflits, un programme soutenu par le département d'État américain, a diffusé un rapport choquant sur les crimes de guerre commis par la Russie à l'encontre des enfants ukrainiens.
Ce rapport de 35 pages, rédigé en collaboration avec le Yale Humanitarian Research Lab, révèle de graves manquements de la part de la Russie : des allégations qui, si elles sont vraies, signifient que le pays a commis des crimes de guerre contre les enfants ukrainiens.
Le nouveau rapport indique que les forces russes auraient déplacé un minimum de 6 000 enfants ukrainiens vers des camps et des installations russes en vue d'adoptions forcées et d'entraînements militaires.
Tel que reporté par CNN, Nathanial Raymond, du Yale Humanitarian Research Lab, a déclaré à la presse le 14 février : "Tous les niveaux du gouvernement russe sont impliqués."
Raymond a ajouté que ce rapport devait être considéré comme "une gigantesque alerte Amber [une alerte enlèvement] que nous lançons pour les enfants ukrainiens".
NPR a rapporté que ce nouveau rapport intitulé "Programme systématique de la Russie pour la rééducation et l'adoption d'enfants ukrainiens" explique l'approche terrifiante et systématique du Kremlin visant essentiellement à kidnapper les enfants ukrainiens et à les "rééduquer" dans un esprit pro-russe et à les empêcher de retourner dans leur pays.
Les auteurs du rapport ont écrit qu'il semble que 75 % de ces camps pour enfants ukrainiens "exposent les enfants d'Ukraine à une éducation académique, culturelle, patriotique et/ou militaire centrée sur la Russie..."
Les auteurs poursuivent : "... dans le but apparent d'intégrer les enfants d'Ukraine dans la vision du gouvernement russe de la culture, de l'histoire et de la société nationales."
Le directeur général du Yale Humanitarian Research Lab, Nathaniel Raymond, a déclaré à NPR : "Il ne s'agit pas d'un camp de voyous, ni d'un maire ou d'un gouverneur véreux. C'est une entreprise logistique massive qui ne se produit pas par accident."
L'étude a permis de découvrir au moins 32 centres dédiés à la rééducation et deux camps d'entraînement militaire, tous deux destinés à l'éducation des enfants ukrainiens.
Raymond a également expliqué à la presse que le but premier des camps semble être la "rééducation politique".
Cependant, il semble également que certains centres soient "dédiés à un processus d'adoption accéléré, et d'autres sont utilisés comme centres de formation militaire".
Selon le rapport, le plus jeune enfant trouvé dans un centre d'adoption avait quatre mois, et dans les camps d'entraînement militaire, les plus jeunes enfants avaient quatorze ans. Une enquête plus approfondie est nécessaire, mais selon Nathaniel Raymond, il y aurait plus de 43 centres de ce type.
CNN rapporte que Raymond a également déclaré que deux camps, l'un en Tchétchénie et l'autre en Crimée, "semblent être spécifiquement impliqués dans la formation des enfants à l'utilisation des armes à feu et des véhicules militaires".
Heureusement, les auteurs du rapport ont déclaré qu'ils n'ont pas encore vu de preuve que ces enfants formés par l'armée sont envoyés à la guerre.
Malheureusement, le rapport indique qu'il semble que de nombreux parents aient été contraints de laisser leurs enfants partir avec les Russes : "dans de nombreux cas, la capacité des parents à donner un consentement valable peut être considérée comme douteuse, car les conditions de guerre et la menace implicite des forces d'occupation représentent des conditions de contrainte."
Sans surprise, face à ces allégations, la Russie n'a cessé de nier tout acte répréhensible. Selon le Telegraph, l'ambassade de Russie à Washington a qualifié d'"absurdes" les allégations détaillées dans le rapport.
Cependant, comme le souligne NPR dans son article sur le sujet, la Russie ne nie pas que des enfants ukrainiens aient été déplacés en Russie.
Debra Ramos du NPR a écrit que les responsables russes "insistent sur le fait que les camps font partie d'un vaste projet humanitaire pour les orphelins abandonnés et traumatisés par la guerre".
Ramos a ajouté : "La Russie ne précise pas combien d'enfants se trouvent sur son territoire ni où ils sont hébergés."
Début février, CNBC a rapporté qu'Andriy Kostin, le procureur général d'Ukraine, a déclaré que son équipe estime que les Russes ont commis plus de 65 000 crimes de guerre depuis le début de l'invasion en 2022.
En outre, la chaîne CNBC a relevé que, selon Kostin, des documents montrent que plus de 14 000 enfants ukrainiens ont été adoptés de force en Russie.
Selon CNBC toujours, Kostin s'est adressé à un groupe de la Georgetown Law School à Washington début février et a déclaré : "Il s'agit d'une politique directe visant à un changement démographique en supprimant l'identité ukrainienne. Ces actions sont caractéristiques du crime de génocide."
Les auteurs du rapport hésitent pour l'instant à utiliser eux-mêmes le mot "génocide" ; ils conviennent toutefois que les actions de la Russie à l'égard des enfants ukrainiens semblent constituer une violation manifeste des conventions de Genève de 1949, qui stipulent explicitement que le transfert forcé massif de civils est interdit.
Nathaniel Raymond indique que, selon le rapport, la Russie a rendu un total de 37 enfants ukrainiens à leurs familles. Malheureusement, des milliers d'autres n'ont toujours pas été rendus, ce qui fait des actions de la Russie un crime de guerre potentiel.
Selon CNN, Raymond a déclaré : "Il s'agit fondamentalement de la garde et du contrôle non consentis de milliers d'enfants ukrainiens. C'est non seulement contraire à la loi, mais aussi à la décence commune."
Lors d'un point de presse du département d'État le 14 février, le porte-parole Ned Price a clairement exprimé le sentiment des États-Unis sur la question : "Le système russe de relocalisation, de rééducation et d'adoption forcées des enfants ukrainiens est un élément clé des efforts systématiques du Kremlin pour nier et supprimer l'identité de l'Ukraine, son histoire et sa culture."
Price a poursuivi : "Les effets dévastateurs de la guerre d'agression ratée de la Russie seront ressentis par de nombreuses générations à venir."