Donald Trump de retour à la Maison-Blanche : une nouvelle ère de défis pour l'Europe ?
Alors que les commentateurs prédisaient un résultat serré, Donald Trump et le Parti républicain ont réalisé un carton plein aux élections du 5 novembre, remportant la Maison-Blanche, le vote populaire, les États clés, mais aussi le Sénat et la Chambre des représentants.
Avec un Congrès et une Cour suprême acquis à sa cause, le président élu aura les mains libres pour mener sa politique à partir de janvier prochain. Et celle-ci se résume en deux mots : America First.
Vieil allié et principal partenaire commercial des États-Unis, l’Europe doit, comme le reste du monde, s’attendre à un virage abrupt dans les relations internationales. Quelles sont les conséquences concrètes de l’élection de Trump pour le Vieux Continent ?
Les griefs de l’homme d’affaires contre l’Europe sont anciens et connus : le continent profiterait d’un excédent commercial élevé avec les États-Unis, tout en bénéficiant « gratuitement » de la protection militaire offerte par la première puissance mondiale.
Donald Trump souhaite mettre fin à cette situation, alors que l’Europe se débat dans la stagnation économique et les crises politiques de ses États-membres. Par ailleurs, la guerre en Ukraine qui sévit à ses portes rappelle constamment la menace russe pour sa sécurité.
En 2023, l’excédent commercial de l’UE sur les États-Unis s’est élevé à 215 milliards d’euros, soit le double de son niveau de 2016, l’année de la première élection de Donald Trump, indiquent Les Échos.
À elle seule, l’Allemagne a totalisé 86 milliards d’euros d’excédent commercial avec les États-Unis en 2023. L’Italie, l’Irlande et la Suède ont par ailleurs affiché chacune un excédent supérieur à 10 milliards.
Durant son premier mandat, Trump avait instauré des droits de douane sur l’aluminium et l’acier européens. Cette fois, il pourrait viser les secteurs des produits chimiques et des matériels de transport, dont les excédents étaient respectivement de 58 milliards et 102 milliards d’euros en 2023.
Outre les taxes spécifiques sur certains secteurs, le président américain élu prévoit des droits de douane généraux de 10 à 20 % sur l’ensemble des produits importés depuis l’Europe. Un moindre mal par rapport aux 60 % prévus sur les produits chinois !
Les champions européens sont donc confrontés à l’incertitude et à des perspectives négatives sur leurs affaires aux États-Unis. L’industrie automobile allemande et les géants français du luxe et des spiritueux devraient être particulièrement touchés.
Selon différentes analyses mentionnées par Politico, le protectionnisme à la sauce Trump pourrait amputer de 0,5 à 1 point le PIB de la zone euro. Avec un impact plus élevé pour les pays très exportateurs, comme l’Allemagne.
Ainsi, une étude de l’Institut allemand pour l’économie (IW) a estimé à 180 milliards d’euros le coût pour l’économie allemande de la seconde présidence Trump.
Par ailleurs, les droits de douane prohibitifs que Donald Trump compte appliquer à la Chine pourraient pousser celle-ci à déverser ses surplus sur l’Europe, fragilisant encore davantage le potentiel productif du Vieux Continent.
« Les tarifs douaniers de Trump seront doublement douloureux, non seulement en raison de l'effet direct, mais aussi de l'effet indirect, la Chine détournant ses exportations vers l'Europe », résume Alicia García-Herrero, cheffe économiste pour l’Asie-Pacifique à la banque Natixis, citée par Politico.
Une « task force » de l’Union européenne travaille déjà à des mesures de rétorsion qui pourraient être adoptées en réponse à l’offensive prévue de l’administration américaine. Mais l’UE souhaite officiellement éviter une guerre commerciale avec son partenaire.
Donald Trump n’entend pas plus épargner l’Europe dans le domaine militaire que dans le domaine économique, rappelant que les États-Unis dépensent 3,5 % de leur PIB pour l’armée, soit beaucoup plus que la plupart des pays européens.
Durant la campagne, il avait déjà menacé de ne pas soutenir les États-membres de l’OTAN dont le budget de la défense est inférieur à 2 % du PIB en cas d’agression extérieure. De quoi inquiéter dans les chancelleries européennes !
Par ailleurs, l’éventualité d’un retrait complet des États-Unis de l’Alliance n’est pas exclue, ce qui rendrait encore plus vulnérables les pays les plus exposés à la menace russe, comme les États baltes ou la Finlande.
Une chose est sûre : les pays européens vont commencer dès maintenant à se réarmer pour être en mesure de se défendre de manière autonome si l’allié d’outre-Atlantique manque à l’appel.
Donald Trump prétend depuis des mois être en mesure de mettre fin à la guerre en Ukraine « en 24 heures », en forçant Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky à négocier un compromis de paix.
Cependant, un tel accord impliquerait probablement de céder à la Russie les territoires ukrainiens qu’elle occupe déjà. Les incertitudes sur la suite du conflit restent très élevées, tant pour l’Ukraine que pour le reste de l’Europe.
Le président français Emmanuel Macron a réagi aux résultats des élections américaines en promettant « d'œuvrer pour une Europe plus unie, plus forte, plus souveraine », en partenariat avec le chancelier allemand Olaf Scholz, rappelle France Info.
Face à une succession de crises et à des États-Unis bien décidés à faire cavalier seul, l’Europe parviendra-t-elle à relever le défi d’une nouvelle présidence Trump pour affronter les menaces existentielles auxquelles elle est confrontée ?