Avec l'arrivée de superstars du football mondial, le sport est plus que jamais un outil d’influence pour l’Arabie Saoudite
Menée 1-0 à la mi-temps lors de son premier match de Coupe du monde contre l’Argentine de Lionel Messi, l’Arabie saoudite s’était montrée renversante en deuxième période. Les hommes d’Hervé Renard ont triomphé (2-1) du futur vainqueur de la compétition qui restait sur une série d’invincibilité de 36 matchs !
Au lendemain de cette victoire historique contre l’Albiceleste, le pays a déclaré férié la date de ce match. Malgré leur élimination au premier tour, Les Faucons verts ont fait sensation durant cette Coupe du monde organisée par le voisin et rival qatari.
Cette victoire de prestige a braqué les projecteurs sur une sélection saoudienne en progression constante depuis quelques années. Victorieuse contre l’Égypte au Mondial russe de 2018, finaliste de la Coupe du Golfe des nations en 2019, l’Arabie saoudite s’impose petit à petit comme l’une des sélections qui comptent dans le football asiatique.
Mais c’est dans le football de club que l’Arabie saoudite a fait parler d’elle fin décembre 2022. Indésirable à Manchester United, la légende portugaise Cristiano Ronaldo s’est engagée au club saoudien d’Al-Nassr.
Lors de sa conférence de présentation au club, CR7 a fait l’éloge du championnat saoudien : « En Europe le travail a été fait, j'ai tout gagné et je suis fier d'avoir pris cette décision. (...) La Ligue saoudienne est très compétitive. Mais les gens ne le savent pas. »
L’arrivée du joueur portugais est donc un énorme coup médiatique pour l’Arabie saoudite. La présence du quintuple Ballon d’or, même en fin de carrière, donne au pays une occasion inédite d’attirer l’attention sur son football.
L’Arabie saoudite a d’ailleurs réussi à enrôler les deux monstres sacrés du football mondial l'an dernier, puisque le champion du monde et septuple Ballon d’or Lionel Messi a été nommé ambassadeur du tourisme pour l’Arabie saoudite en mai 2022. Un pied de nez au Qatar, qui possède via son fonds QSI le Paris Saint-Germain où l’Argentin a évolué entre 2021 et 2023.
Lionel Messi s'est d'ailleurs vu proposer un contrat en or pour rejoindre un club saoudien et devenir la nouvelle tête de gondole du championnat local avec son éternel rival Cristiano Ronaldo. Mais La Pulga a refusé l'offre et se dirigerait vers l'Inter Miami, un club de la MLS américaine.
Le football saoudien pourra se consoler avec l'arrivée au club d'Al-Ittihad d'un autre géant, le Ballon d'or 2022 Karim Benzema. Le Français vient de quitter le Real Madrid après 14 saisons de bons et services et 5 Ligues des champions remportées.
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L'ancien numéro 9 du Real s'est engagé pour une durée de trois ans et une rémunération totale estimée à 200 millions d'euros annuels. Neuf fois champion national, le club basé à Jeddah est actuellement leader du championnat d'Arabie saoudite.
Et le royaume ne compte pas s'arrêter là avec la venue de stars des grands championnats européens puisque le nom de Luka Modric, lui aussi Ballon d'or en 2018, revient avec insistance. Selon la presse spécialisée, le pays aurait ciblé d'autres gloires du football comme Sergio Ramos, Hugo Lloris ou Roberto Firmino.
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La principale puissance de la péninsule arabique poursuit une stratégie de développement tous azimuts dans le football. Le club anglais de Newcastle United a été racheté en 2021 par le fonds souverain saoudien Public Investment Fund (PIF).
Le choix de Newcastle, qui ne fait partie ni des principales villes ni des clubs les plus huppés d’Angleterre, a pu surprendre. Mais comme l’a fait remarquer l’expert en géopolitique du sport Jean-Baptiste Guégan au média ‘Jeune Afrique’, les Saoudiens « savent aussi que quand les Émirats ont racheté Manchester City, ce club n’était pas très bien portant. Et on voit où il en est aujourd’hui… »
Quoi qu’il en soit, en rachetant le club de Newcastle, l’Arabie saoudite a mis un pied dans le championnat de football le plus riche, le plus suivi et le plus prestigieux au monde. De quoi favoriser son développement futur en Europe !
Le pays avait aussi fait une offre de quatre milliards d’euros pour racheter Manchester United, jugée insuffisante par les propriétaires des Red Devils. Mais les Saoudiens n'ont pas encore dit leur dernier mot concernant la reprise de l'un des clubs les suivis au monde.
Des investisseurs saoudiens avaient par ailleurs communiqué leur intérêt pour l’Olympique de Marseille. Mais pour l'instant, la convoitise de ce pays se porte surtout sur l'attaquant chilien Alexis Sanchez, ciblé par le club d'Al-Fateh, mais que l'OM souhaiterait conserver la saison prochaine.
Très active dans le football, l’Arabie saoudite développe également sa présence et sa visibilité à l’international à travers d’autres sports. Le pays a de grands projets dans ce domaine pour les prochaines années…
L’organisation des Jeux Asiatiques d’hiver de 2029 a en effet été attribuée à l’Arabie saoudite en 2022. Une décision fortement contestée compte tenu de la réputation du pays concernant les droits humains et de l’incompatibilité de son climat avec l’organisation de jeux d’hiver.
Preuve que le sport s’inscrit dans une stratégie plus globale de développement, les Jeux asiatiques d’hiver de 2029 doivent en principe avoir lieu dans la mégapole futuriste de Neom, actuellement en cours de construction.
L’Arabie saoudite accueillera également les Jeux asiatiques de 2034. Le pays est par ailleurs candidat pour l’organisation de la Coupe du monde de football en 2030, et compte donc jouer les premiers rôles dans l’organisation de grandes compétitions sportives au niveau mondial.
L’activisme saoudien s’explique aussi par la rivalité géopolitique de ce pays avec le Qatar. Propriétaire du PSG depuis 2011, l’émirat du Golfe a multiplié les investissements dans le sport et organisé la Coupe du monde 2022 avec succès (malgré de nombreuses controverses).
À travers le sport, l’Arabie saoudite cherche donc à disposer d’un outil d’influence à l’échelle globale, tout en investissant ses considérables réserves financières et en développant le tourisme sur son territoire.
Cependant, l’accueil de ces compétitions et la construction de la mégapole de Neom nécessitent des investissements colossaux et les capacités du pays ne sont pas non plus illimitées. Comme le résume Jean-Baptiste Guégan, toujours dans son entretien avec 'Jeune Afrique', « ils peuvent y mettre beaucoup d’argent, à condition de rester assez raisonnables aux yeux du peuple, avec qui il y a un pacte social. »
Outre l’aspect économique, le sport est pour l’Arabie saoudite comme pour le Qatar un moyen de redorer son blason auprès de la communauté internationale. Ces deux pays restent très critiqués dans le monde entier en raison du sort des femmes, des personnes LGBT et de conditions de travail jugées inhumaines.
L’actualité récente autour du sport en Arabie saoudite ne doit donc rien au hasard : cet acteur majeur du monde arabe et du Moyen-Orient a pour ambition de devenir un hub sportif et, à travers le sport, de renforcer sa puissance économique et diplomatique à l’échelle planétaire.